Le visage d’Arthur s’assombrit. « Pourquoi vous montrez-vous si cruelle avec moi ?
— Je ne fais que me défendre. Et puis, en parlant de cruauté, que pouvez-vous me dire à propos du cheval qui a été la cause de ma blessure ?
— Je… eh bien ce cheval a été abattu, bien sûr, je ne voulais pas risquer qu’il ne vous blesse de nouveau, ou qu’il blesse quelqu’un d’autre.
— Ce n’est pas de cela que je parle. Et vous savez très bien ce que je veux dire par là. »
Le seigneur paraissait désarçonné par le tour que prenait la conversation. « Je ne sais pas ce que vous cherchez à me faire dire, ma fille. Je n’ai jamais eu l’intention de vous causer du mal avec ce cheval.
— À moi, non, je suppose. Mais je vous garde à l’œil et j’espère que vous n’aurez jamais plus l’intention de causer du mal à qui que ce soit avec quoi que ce soit.
— Je… hum… je garderai vos paroles à l’esprit, même si je ne suis pas certain d’avoir tout compris. »
Il resta encore quelques instants, comme s’il réfléchissait à la meilleure façon de formuler sa pensée, puis secoua la tête et quitta les appartements de sa fille. Soulagée qu’il soit parti, Éléonore était tout de suite retournée au chevet du blessé, qui dormait à poings fermés. Elle avait ensuite pris quelques minutes pour continuer sa longue lettre à [Bidulon], où elle retraçait toutes ses aventures, ses émotions et ses doutes. Comme toujours, elle sentit mieux après lui avoir écrit. Un peu comme s’ils avaient vraiment une discussion, mais ses réponses lui faisaient cruellement défaut ; les avis de [Bidulon] lui manquaient.
Malgré tout ce qu’Éléonore avait pu dire pour s’en débarrasser, Jodie refit une apparition pour l’avertir qu’elle était attendue dans la salle à manger pour dîner en compagnie d’Arthur. « Je mangerai ici. » fut la seule réponse d’Éléonore. Une fois que la servante fut partie, elle se dit qu’elle aurait dû demander de quoi manger pour Gaël aussi, mais étant donné la quantité que Jodie lui apportait à chaque fois, il y en aurait assez pour deux, voire trois. Ceci dit, elle n’était pas certaine que le blessé dans son lit soit éveillé lorsque le repas arriverait.
En revenant débarrasser le plateau, Jodie afficha une nouvelle mine désapprobatrice en constatant que l’homme blessé dormait toujours dans le lit de sa maîtresse. « Il n’allait pas soudainement disparaître, lança Éléonore d’un ton moqueur.
— Oui madame, quel dommage. »
Éléonore leva les yeux au ciel et ne chercha pas plus le dialogue, soulagée que la servante la laisse tranquille. Toutes les émotions de la journée l’avaient fatiguée et elle décida d’imiter Gaël. Elle passa un peu de temps à comprendre comment enlever cette nouvelle tenue, passa une chemise de nuit, puis se glissa dans son lit en prenant garde de ne pas déranger son occupant. Souriant d’imaginer la tête outrée que ferait Jodie en les voyant, elle s’endormit à son tour. Au milieu de la nuit, elle sursauta. Gaël avait visiblement le sommeil agité, comme s’il cauchemardait. Elle le prit dans ses bras, attendant qu’il se calme, puis ils se rendormirent tous les deux paisiblement.
533 mots minuscules. Ça va être rigolo quand je vais devoir rattraper les 2500 mots de retard x)