– Mais voyons Beyla, il fallait bien que je vérifie si je pouvais les laisser entrer, rétorqua le dverg. Je ne peux tout de même pas ouvrir notre porte à n’importe qui.
– C’est ça le forgeron des étoiles ? chuchota l’enfant à sa protectrice.
– Comment ça, ça ? s’étrangla un Nurri outré. Je ne te parais pas assez grand pour mériter ce titre c’est ça ? Je m’en vais t’en donner, moi, des ça tiens… Tsss. Et que faites vous là, chez moi, pour commencer vous deux ? »
Bård adressa un regard hésitant à Fen qui lui répondit avec un hochement de tête encourageant. « C’est… C’est un rouge gorge qui m’a dit de venir ici, expliqua-t-il.
– Pia ! » cria alors Nurri en faisant sursauter le garçon. En réponse à l’appel du dverg, un petit oiseau voleta jusqu’à son doigt tendu, où il se percha. « Cet oiseau là ? s’assura le petit être trapu.
– Peut être bien, supposa l’enfant qui n’avait aucune idée de comment distinguer un rouge gorge d’un autre.
– Il s’agissait bien de cette charmante oiselle, appuya Fen. Mon nez ne me trompe pas.
– Mmhmm, émit le forgeron des étoiles. Tu es donc le second fils de Dame Doelyn, je suis bien aise de faire enfin ta connaissance.
– Euh… Et bien merci. » Répondit Bård en jetant un nouveau coup d’oeil incertain en direction de sa protectrice. Il ne savait pas ce qu’il devait répondre à tout cela et les pensées se bousculaient dans son esprit. La fameuse Doelyn dont avait parlé le corbeau Mørk, celui qui était un peu idiot, devait donc bel et bien être sa mère.
« Toutes mes condoléances, ajouta le dverg sur un ton étonnamment doux. C’est une terrible perte, elle était une élève formidable.
– Une élève ? s’ébahit le garçon qui n’avait pas encore totalement quitté l’âge où l’on considère ses parents comme des dieux.
– Oui oui, confirma Nurri. Un beau jour elle est venue me voir pour me demander de lui apprendre l’art de la forge. » Il toussota d’un air gêné. « En réalité c’est d’elle que me vient mon surnom de forgeron des étoiles. » Il lissa machinalement sa barbe fournie. « Quoiqu’il en soit, dès que j’ai appris pour son décès, j’ai immédiatement envoyé Pia et Rikk à la recherche de ses fils.
– Pour quelle raison ? s’enquit Fen.
– Parce qu’elle avait laissé un cadeau pour chacun d’eux chez moi. » Répondit le dverg. Les yeux de Bård s’illuminèrent et son coeur bondit dans sa poitrine. Sa mère avait laissé quelque chose pour lui, en plus de son joli couteau que ce pompeux de Siegfried avait voulu lui voler. “Rikk n’est pas encore revenu, mais suivez moi, je vais vous montrer le leg du jeune Bård.”
Nurri s’empara d’une lanterne qu’il remplit d’huile et alluma soigneusement. Ceci fait, il ouvrit une porte qui menait à un escalier qu’il entreprit de descendre. Malgré la lumière de la lanterne, le garçon n’y voyait pas grand chose et il craignait de trébucher. Le dverg devait avoir l’habitude puisqu’en écho aux pensées de l’enfant, il déclara : “Ne vous inquiétez pas, une fois que nous serons en bas nous, serons mieux éclairés.” La descente parut interminable. Bård se demanda jusqu’à quelle profondeur le forgeron des étoiles allait les mener. Il s’interrogeait également sur la raison pour laquelle sa mère, Dame Doelyn, l’avait surnommé forgeron des étoiles, lui qui les menait des lieues sous terre. En tous cas, il en avait l’impression.
Après avoir descendu l’équivalent de plusieurs étages, qui semblèrent durer des heures au garçon, ils débouchèrent sur une salle immense où régnait une chaleur intense. Quel contraste par rapport au froid glacial dont il avait pris l’habitude depuis ces derniers jours ! L’enfant se sentit même un peu nauséeux. “Bienvenue dans mon atelier !” leur souhaita le dverg avec un entrain qui dépareillait de son ton bourru avec lequel il les avait accueillis. Bård n’avait jamais vu une pièce aussi grande ni jamais ressenti autant de chaleur.