Kit parut se souvenir brusquement de quelque chose et se redressa brutalement d’un coup. « Ho, on se calme, lui enjoignit le rancher roux en le recouchant d’autorité.
– Mais, il faut que je trouve Bran, plaida l’adolescent d’un air hagard.
– J’avais compris ça ; je l’ai envoyé chercher. » Kit parut se rasséréner un peu. « Reste là, reprit Jack. Je vais t’amener quelque chose à boire. » Une fois qu’il se fut assuré que le petit mal en point qu’il avait ramassé se tiendrait tranquille, l’homme alla lui chercher un verre d’eau. « Tiens, bois, lui enjoignit il.
– Il arrive quand, Bran ? s’enquit l’adolescent.
– Bois, répéta Jack. Je te répondrai après. » Kit avala le contenu du verre d’un trait et renouvela sa question. « Par les anciens de la Vieille Terre ! Qu’il est pénible celui là ! S’exclama le rancher. Il arrivera quand il pourra. Mais rassure toi, il n’était pas parti depuis très longtemps, du coup il sera là d’une minute à l’autre. En attendant, si tu me racontais ce qui t’amène là, garçon ?
– Je ne sais pas trop si c’est une bonne idée… Hésita Kit qui avait été bien échaudé par les évènements de la journée.
– Allons, petit, tu sais bien que tu peux tout dire au vieux Jack ! Argumenta ce dernier qui était vraiment curieux d’en comprendre un peu plus sur les propos décousus du garçon avant qu’il ne perde connaissance.
– Et bien, c’est que c’est grave, contra l’adolescent.
– Ne soit pas inquiet pour ça, le rassura Jack. Tel que tu me vois, j’en ai vu d’autres. »
L’adolescent parut réfléchir et prendre une décision. Mais, au moment où il allait parler, la porte claqua contre le mur et Bran fit irruption dans la pièce. Le visage de Kit s’illumina. Il balaya la pièce du regard. « Jack ? Pourquoi tu m’as fait appeler ? Ca avait l’air urgent… » Sa phrase s’interrompit lorsqu’il aperçut son petit disciple tout pâle qui récupérait sur le canapé. « Kit, tu vas bien ? S’inquiéta le jeune homme. Où est Rielle ? » Jack poussa un soupir en constatant qu’il était passé à un cheveu de connaître l’histoire mais qu’il devait encore faire preuve de patience en attendant que le petit raconte tout à son ami. Avant, il lui fallait rassurer ce dernier.
« Mais oui, il va bien, répondit le rancher avant que le garçon ait eu le temps d’ouvrir la bouche. Il est juste un peu secoué et il en a demandé un petit peu trop à son corps. On dirait qu’il a couru plusieurs dizaines de kilomètres depuis ce matin ! Et aussi qu’il a pris un vilain coup derrière la tête.
– Couru ? Répéta Bran qui avait eu du mal à savoir si Jack plaisantait ou pas.
– Et pris un coup sur la tête, compléta son employeur d’un ton badin.
– Ne t’inquiète pas, intervint Kit. Je vais bien. Mais il faut que tu m’aides ! Ils ont enlevé Rielle et il faut qu’on la retrouve vite !
– Comment ça « ils ont enlevé Rielle » ? Et qui ? »
Le jeune homme attrapa une chaise sur laquelle il s’installa nonchalamment à l’envers et accorda toute son attention à l’adolescent. Ce dernier fit un effort pour rassembler ses idées et raconta à Bran – et, de fait, à Jack également – ce qu’il s’était passé lorsque la petite créature bleue et lui étaient retournés à l’hôtel de sa mère, à Bourgétoile. Il raconta les courses poursuites dans la ville, comment il avait essayé de gagner du temps pour Rielle mais qu’elle était venue lui prêter main forte à la place et comment elle s’était effondrée par terre à cause des armes des mystérieux hommes en uniformes, avant que lui même ne perde connaissance. Il raconta ensuite rapidement qu’il s’était réveillé dans sa chambre avec le Docteur Sam et sa mère et qu’il avait décidé de venir chercher Bran au ranch. « Et donc, tu as couru jusqu’ici juste après avoir repris conscience ? S’étonna Jack qui agissait comme si c’était à lui que Kit s’adressait.
– Oui, il faut faire vite, confirma le garçon.
– Pfiou ! Ce n’est pas étonnant que tu sois tombé par terre en arrivant alors. » Commenta le rancher en grattant ses favoris roux qui tiraient sur le gris.
Bran, quant à lui, s’était accoudé au dossier de la chaise et avait pris sa tête dans ses mains. Il avait l’air accablé. Le silence se fit pendant une poignée de secondes. Puis il se redressa et se passa une main sur la figure. « Je savais que Rielle prenait une partie de tes blessures à ta place, commença-t il enfin. Je l’avais vue faire, cette fois où tu es tombé de l’arbre et que tu aurais du te casser le bras. » Il se tut, conscient que ce qu’il venait de dire n’allait pas s’avérer très utile pour retrouver la petite créature bleue et dorée qui les fixait sans arrêt de ses yeux noirs liquides. « Qu’est ce qui t’a fait dire que j’aurais une solution ? lâcha-t il ensuite d’un ton douloureux.
– Tu as toujours une solution, expliqua simplement le garçon.
– C’est vrai que Bran est doué en solutions. » Approuva Jack en arborant un immense sourire. Sa remarque provoqua un regard assassin de la part du jeune homme accoudé sur le dossier de sa chaise.
« Tu ne sais pas comment on va sauver Rielle ? s’enquit Kit dans la voix duquel s’entendaient des larmes qui formaient une grosse boule dans sa gorge.
– Je… hésita Bran en voyant le visage plein d’espoir du garçon levé vers lui. Tu sais, ça fait vraiment longtemps que je ne suis pas allé dans l’espace. J’étais vraiment jeune quand je suis arrivé ici ; je ne suis pas la personne la mieux placée pour t’aider à retrouver Rielle. Au contraire. Je suis désolé. » Il en était d’autant plus désolé que, le matin même tandis qu’ils attendaient que Kit se réveille, la jeune fille l’avait embrassé. Une vague de froid avait parcouru tout son être et il en avait violemment frissonné. Il avait prit cela comme un coup de foudre, tandis qu’il répondait au baiser. Ce qui l’avait étonné, c’est que Rielle avait eu l’air surprise de se faire embrasser à son tour. Quoiqu’il en soit, comme ils avaient été dérangés par le réveil du dormeur, il avait eu l’intention de lui en parler de nouveau plus tard. Il avait du mal à imaginer qu’il n’aurait peut être plus l’occasion de s’expliquer avec elle mais, honnêtement, il se sentait désemparé face à cette situation pour laquelle il ne savait pas quoi faire.
« Que de pessimisme dans cette pièce, rugit soudainement Jack. J’ai déjà rencontré ces uniformes gris dont tu parles, petit, ajouta-t il à l’intention de Kit sur un ton plus doux en constatant qu’il avait fait sursauter les deux plus jeunes. Je ne me souviens plus exactement dans quelles circonstances, mais cela importe peu dans le cas présent. Quoiqu’il en soit, ce dont je me souviens, c’est que je ne les appréciais pas trop, ça non ! Je voyageais beaucoup d’une planète à l’autre à l’époque et j’ai acquis pas mal de… contacts, dirons nous, au cours de mes pérégrinations. » Il fit une pause et remarqua que les deux garçons étaient pendus à ses lèvres. Il sourit dans sa moustache et laissa échapper un petit rire. « Par contre, reprit il, avant de continuer plus avant, j’ai besoin que vous me disiez à quel point vous tenez à cette créature. » Il les jaugea du regard. Le silence s’abattit de nouveau sur la pièce pendant quelques secondes.
« C’est ma soeur, répondit Kit. Je ne sais pas comment l’expliquer, puisque ce n’est pas ma vraie soeur, mais elle fait partie de moi.
– Je… hésita Bran qui ne savait pas comment formuler son ressenti. Je me sens responsable d’elle, comme je me sens responsable de Kit. » Il n’avait trouvé que cette platitude à dire. Elle n’en était pas moins vraie, mais elle n’était pas représentative de ce qu’il ressentait vraiment. Jack lui jeta un coup d’oeil pénétrant. Le jeune homme esquiva son regard et ne put s’empêcher de rougir. Le rancher s’esclaffa à gorge déployée. Kit, lui, ne comprit pas ce qui faisait rire Jack, mais il retrouva l’espoir qu’on l’aiderait à sauver Rielle. Après tout, quelqu’un qui riait aussi franchement que cela ne pouvait pas annoncer ensuite une mauvaise nouvelle, n’est ce pas ?
« Je vois, je vois, déclara finalement le rancher en essuyant une larme à la commissure des paupières. Je vois tout à fait vos motivations. Celles que vous m’avez dite, et les autres aussi. Fort bien. » Il se leva et étira son dos, en le faisant craquer. « Aaah ! Ca fait du bien. Il ne fait pas bon vieillir, tenez vous le pour dit. Bref. » Il se servit une rasade de cet alcool qu’il distillait lui même et dont il était si fier. Puis, il versa la même quantité de Special Jack pour chacun des deux garçons. « Voilà ce qu’il va se passer, les petits. Je connais quelqu’un qui possède un vaisseau qui pourra vous emmener dans l’espace. C’est une personne un peu revêche mais, si je lui demande, je pense qu’elle sera d’accord pour vous aider à retrouver votre amie.
– C’est vrai ? Se réjouit Kit.
– Bien sûr que c’est vrai, répartit le rancher. Je ne me serais pas usé la salive pour dire des mensonges à deux perdreaux de l’année. Franchement, aucun intérêt à ça.
– Et tu vas venir aussi ?
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