« Cédric ? C’est Stéphanie ! Tu m’ouvres ? » Surpris de la présence de son amie, le garçon lui accorda l’accès et attendit qu’elle monte les trois étages. Elle arriva par les escaliers, essoufflée de son ascension et sourit en le voyant. Ils se rendirent tous les deux dans la chambre de Cédric et Stéphanie sortit le livre qu’elle avait gardé de son sac à dos. Le titre en était Histoire et Géographie des Deux Mondes.
« Wahou, tout un programme ! S’exclama le garçon. Regarde le mien, il parle de centaures.
– Génial ! S’enthousiasma son amie. Valentine a gardé Les Enigmes Mathémagiques. Il faudrait l’appeler, comme ça nous pourrions en discuter tous les trois.
– Elle ne peut pas venir ?
– Ca m’étonnerait beaucoup : tu as vu ses parents ? Parce que déjà quand j’étais en vacances avec elle, ils n’étaient pas très permissifs. Alors là, maintenant que l’école a repris… »
Cédric acquiesça, compréhensif. Il voyait tout à fait le tableau ; leur ami Lucas était doté du même modèle de parents. Le garçon alla donc récupérer le téléphone sans fil de la maison et Stéphanie composa le numéro de Valentine. Une fois la fillette blonde en ligne, Cédric enclencha le haut-parleur du téléphone et ils discutèrent tous les trois de leurs expérience de la matinée et du contenu époustouflant des trois livres en leur possession. Cela leur prit plusieurs heures, à l’issue desquelles Valentine dut raccrocher et Stéphanie rentrer.
Lorsque la famille Berger fut réunie pour le dîner, les parents questionnèrent Cédric à propos de sa pré-rentrée. « L’air là-bas est très lourd, raconta le garçon.
– Tu as beaucoup de cours ? Lui demanda sa mère.
– Je ne sais pas. » Hésita Cédric qui ne savait pas ce que représentaient beaucoup de cours. Il alla chercher son agenda pour montrer son emploi du temps à Céline. Sa soeur aînée entrant en quatrième, elle était pour lui une spécialiste en la matière.
« Il a autant d’heures de cours que moi, trancha Céline. Mais il a des heures d’études jusqu’à dix huit heures à chaque fois.
– Ca fait tard dix huit heures tous les soirs pour un enfant de onze ans, non ? S’inquiéta leur père.
– C’est pour nous faire sortir du collège des Alouettes après que la plupart des collégiens soient partis, expliqua Cédric. Pendant ce temps, ils ont dit qu’il faudrait faire nos devoirs. Surtout les devoirs pratiques qu’on ne peut pas faire ici. »
Il continua de leur raconter ce qu’il avait appris de sa future vie d’élève magicien. Ses parents et Céline estimèrent que cela ressemblait à une vie classique de collégien. Sûrement parce que l’établissement dépendait du ministère de l’Education Nationale, précisa leur mère. Sa soeur aînée semblait un peu jalouse qu’il puisse aller dans un monde magique et Carine la benjamine buvait ses paroles.
A l’issue du repas, les parents avaient l’air à peu près rassurés par le programme de leur fils qui était suffisamment ressemblant à un programme classique. Le futur magicien se coucha en se demandant ce que lui réserverait sa première journée de cours le lendemain. Il mit du temps à s’endormir et rêva d’un centaure à moitié écorché qui chevauchait sur des dates en poursuivant le nombre d’or.
Accompagné de Stéphanie et Valentine, Cédric traversa le miroir sous les yeux attentif d’une surveillante. Bien évidemment, Michel n’était pas là : il était sûrement lui-même en cours. En revanche, Jérémy les attendait et son visage s’illumina en les voyant et il les accompagna jusqu’à leurs casiers pour qu’ils récupèrent leurs affaires de cours. Il leur raconta qu’il avait été attaqué par des chiens de Culann mais qu’il avait brillamment eu le dessus. D’après son ton, les chiens de Culann devaient être des créatures effrayantes et dangereuses.
« Grâce à ton catalyseur ? Lui demanda innocemment Valentine.
– Mmmh… Bien évidemment ! Pérora le garçon. Mollasson est mon fidèle compagnon et, comme tout catalyseur qui se respecte, un allié indéniable ! » Mollasson le changeforme dégoulina hors du sac en bandoulière de Jérémy avec un bruit de succion et s’étala paresseusement sur le sol.
Son propriétaire eut brièvement l’air gêné, avant de reprendre contenance et de ramasser son catalyseur. Pendant ce temps, Stéphanie serrait joyeusement contre elle sa loutre redevenue vivante et Cédric constatait la réapparition de le brume qui le suivait partout. Il doutait qu’elle ait vraiment disparu pendant qu’il était chez lui, mais elle avait repris une certaine consistance.
Ils se rendirent ensuite à leur première heure de cours de la journée. Ils avaient Histoire-Géographie avec madame Verone, dans le même joli amphithéâtre de la veille. De grandes cartes peintes sur cuir avaient fait leur apparition autour du tableau et du côté de la pièce non ouverte par les immenses fenêtres. Les quatre amis y retrouvèrent Matéo qui s’était assis au même endroit que la veille lorsqu’il était avec eux.
Ils le rejoignirent et eurent à peine le temps de s’asseoir qu’ils sursautèrent en entendant claquer la porte. « Il est l’heure, les informa madame Verone. Je ne tolère pas le retard. Tenez-vous le pour dit : au moindre retard vous devrez passer par le bureau de monsieur Vitterion, le CPE, que nous n’avons pas pu vous présenter hier car il était absent. » Elle fit l’appel et constata qu’il ne manquait personne. Elle se fendit d’un petit hochement de tête approbateur et commença le cours.
Elle leur fit une introduction sur les origines du découpage du monde en deux versions en miroir. L’un qui était le règne de la magie et l’autre libre de son influence. Les portes entre deux mondes étaient toujours ouvertes pendant l’antiquité, ce qui provoqua toute une quantité de mythes dans le monde sans magie, puisque beaucoup de magie s’y infiltrait.
Au Moyen-âge, les tensions entre les clergés et les éminences magiques devenaient très graves. Les portes entre les deux mondes furent fermées et les magiciens restés du côté sans magie, désormais bien affaiblis sans l’apport en magie, se retrouvèrent pourchassés. Les relations entre les deux mondes reprirent beaucoup plus tard, au milieu du vingtième siècle, après la deuxième guerre mondiale. Après leur avoir ainsi résumé ce qu’ils allaient étudier, elle leur fit sortir un parchemin sur lequel elle leur fit noter le titre de la leçon du jour.
« Ohlàlà l’ennuiii ! S’exclama Jérémy en sortant du cours. On sait déjà tout ça…
– Nous non, lui rappela Cédric. D’ailleurs, toi qui sait tout, qu’est ce que c’est que le cours de Magie Fondamentale qu’il y a juste après ?
– Ils vont nous expliquer les cinq éléments fondamentaux de la magie. » Expliqua fièrement le garçon brun.
Le cours de Magie Fondamentale avait lieu au troisième étage d’une tour biscornue, située au milieu du parc de l’établissement. L’enseignante se nommait mademoiselle Dunoyer et était une petite personne d’un certain âge aux cheveux brun roux. Elle parlait d’une voix traînante, avec un fort accent d’origine inconnue à Cédric. « Asseyez-vous, asseyez-vous ! Leur enjoignit-elle avec de grands gestes alors qu’ils entraient dans sa salle. Et ceux qui sont petits comme une botte, veuillez vous mettre devant et pas au fond, sinon vous n’allez rien voir. »
Les élèves obéirent dans la mesure du possible ; Jérémy et Stéphanie s’assirent à côté et devant Cédric et Valentine qui étaient plus grands. Matéo, lui, se retrouva derrière. Mademoiselle Dunoyer ajusta d’étranges lunettes à plusieurs verres amovibles sur son nez et demanda avidement : « Alors, lequel d’entre vous a eu le brouillard comme catalyseur de magie ? » Tous les élèves de la classe se tournèrent tous en direction du garçon blond. Il ressentit une grande gêne et leva la main.
« Ah ! C’est toi, tu es sûr ?
– Oui, confirma Cédric qui commençait à avoir des sentiments mitigés vis à vis de la professeure de Magie Fondamentale.
– Je t’aurais vu plus charismatique, commenta mademoiselle Dunoyer. Mais oui, je vois bien ta brume. Elle est légère ! Il va falloir travailler tout ça pour faire honneur à tous les élémentalistes fondamentaux, jeune homme. »
Elle n’attendait pas de réponse de la part de Cédric et elle commença immédiatement à leur demander de sortir un parchemin vierge pour la leçon, intitulée Les Cinq Eléments Fondamentaux de la Magie. Elle leur fit noter un grand un : le Brouillard et s’étendit longuement sur cet élément synonyme d’étrangeté et de puissante magie, qui était à l’origine des quatre autres éléments magiques. Pendant tout le cours, madame Dunoyer précisa toutes les grandes choses que pourrait faire Cédric s’il se montrait bon élève et répéta plusieurs fois que les autres devraient se souvenir de lui, car il allait être à l’origine de grandes choses à n’en pas douter.
Cette situation s’avéra éprouvante pour l’apprenti magicien blond et il se sentit vidé en sortant de la salle de classe. Il se sentit encore plus écrasé que d’habitude par l’air chargé d’énergie de ce côté ci du miroir. « Hé, Berger ! L’interpella Artus. La prof a cru que tu étais un maître du Brouillard, mais ce n’est de pas de la brume que tu as : c’est de la laine de mouton ! » Les autres Belles Gens autour de lui pouffèrent de rire pour soutenir la moquerie et le dépassèrent en sortant de la tour. Cédric espéra que l’idée allait vite leur passer.
« Ne les écoute pas, lui conseilla Stéphanie qui portait sa loutre en écharpe. Ils sont juste jaloux qu’un gars issu du monde sans magie ait un super catalyseur.
– Moui, ronchonna le garçon en faisant exprès de foncer vers les gros champignons colorés pour les faire râler. Je préfèrerais qu’ils n’écoutent pas ce que dit cette vieille sorcière !
– Moi je les comprends, intervint Jérémy qui parlait toujours avant de réfléchir. Je suis trop jaloux de toi ! Mon catalyseur est une espèce de bidule informe.
– Ben, le mien aussi, contra Cédric.
– Oui, mais le tien, c’est le Brouillard : c’est le plus fort des éléments !
– Il parait oui, lâcha le garçon blond d’un ton amer. Bon, il faut aller où pour le cours de Magie Pratique ? »
Le cours de Magie Pratique se déroulait dans un gymnase attenant à une salle meublée de paillasses surmontées de chaudrons. Le professeur, monsieur Apowain, faisait partie des Belles Gens. Il demanda aux élèves de se placer en ligne et passa silencieusement devant eux à deux reprises, d’un pas lent, comme s’il faisait une inspection. Cédric et quelques uns de ses camarades ne pouvaient s’empêcher de passer nerveusement d’un pied sur l’autre. Le professeur scruta chacun des élèves et le garçon blond eut l’impression qu’il s’était attardé sur lui.
Monsieur Apowain brisa finalement le silence. « Vous allez, ici, pouvoir vous entraîner à maîtriser vos catalyseurs de magie, à explorer leurs capacités, à vous entraîner à la préparation basique des potions et quelques autres petites choses qui vous serviront durant toute votre vie de magicien. Je vais vous laisser essayer de canaliser de l’énergie magique par vos catalyseurs pour avoir une idée plus précise de ce que j’aurai à vous enseigner. »
Le professeur éparpilla les élèves par petits groupe dans le gymnase et les observa de son regard scrutateur qui semblait enregistrer tout ce qu’il se passait. Les collégiens issus du monde magique parvinrent plus vite à obtenir des effets sur leurs catalyseurs. L’épée d’Artus avait la possibilité de changer de forme et le bijou de Birgit irradiait d’énergie bienfaitrice notamment [ajouter d’autres exemples et vérifier si c’est bien Artus qui a l’épée]. Jérémy parvint à donner une forme d’ours en peluche à son changeforme et avait bon espoir d’en faire un ours véritable.
Parmi les enfants originaires du monde sans magie, la première à obtenir un résultat fut Valentine. Elle s’était concentrée tellement fort qu’elle se retrouva soudainement environnée d’une tornade d’énergie qui la souleva de terre et toutes les cartes de son jeu flottaient autour d’elle, irradiant de différentes couleurs, certaines sifflant d’une manière qui paraissait de mauvais augure.
Monsieur Apowain était déjà présent aux côtés de la fillette, l’encourageant à se calmer et à laisser l’énergie magique s’éparpiller. La tornade perdit de sa puissance, Valentine se reposa au sol et ses cartes se rangèrent toute seule dans leur boîte en carton. « Tu disposes d’un catalyseur de magie très complexe, qui offre beaucoup de possibilités et que je trouve, personnellement, très élégant. Félicitations ma chère. Néanmoins, il risque de vous demander du travail pour en maîtriser toutes les subtilités. »
Le silence planait sur le gymnase.
2072 mots pour aujourd’hui ! Il faut vraiment que je note les noms des camarades et des profs au fur et à mesure, ça va me jouer des tours sinon…