– Vous pouvez me l’envoyer madame Chaudronnier. »
L’image disparut du miroir. La surveillante tourna de nouveau son attention sur le garçon et s’enquit : « Tu sauras trouver ton chemin ou faut-il que je demande à un élève plus âgé de t’accompagner ?
– Ca ira, merci, lui assura Cédric.
– Va vite dans ce cas. »
L’apprenti-magicien obtempéra, après un signe de main à ses amis qui étaient en train de sortir de quoi faire les quelques devoirs qu’ils avaient eu dans la journée. Son sac au symbole de brume en bandoulière et ses volutes de brouillard aux pieds, Cédric sortit de la salle d’étude et s’aventura dans le parc en direction du gymnase. En chemin il essaya d’attraper un champignon piailleur violet, puis un vert et un orange, mais ils filaient trop vite. Il afficha une mine déçue.
Monsieur Apowain l’attendait sur le pas de la double porte du gymnase et lui fit signe d’entrer. « Je savais que tu voudrais essayer de nouveau, déclara le professeur. Je vais te laisser te concentrer tout seul et je viendrai t’aider tout à l’heure. » Quelques autres élèves s’exerçaient dans la salle, y compris le dénommé Michel qui avait accueilli les collégiens lors de leur pré-rentrée. Le lycéen était très concentré, un chaudron étincelant flottant devant lui, et il en faisait jaillir différents liquides qu’il mélangeait dans les airs avant de les faire retourner dans son chaudron.
Cédric était très impressionné mais il essaya de faire abstraction de ce qu’il venait de voir. Il s’assit en tailleur sur un tapis et fixa son regard sur ses petites volutes de brume. Tout ce qui l’entourait se retrouva englouti dans les ténèbres. Il ne restait plus que le garçon et ses volutes indolentes. Elles prirent la forme d’un visage, celui d’une vieille femme.
« Tu es donc un mage de la brume, constata le visage. Enchantée.
– Qui êtes vous ? S’enquit Cédric.
– Une maîtresse du brouillard, comme toi.
– Je ne suis le maître de rien du tout, ronchonna le garçon. Le brouillard ne veut pas catalyser la magie pour moi.
– Hihihi ! Ces jeunes sont toujours pressés. Le brouillard n’est pas un simple catalyseur. C’est la base de toute la magie et donc quelque chose de très brut et très ancien !
– Comment faut-il faire alors ?
– Je t’aiderai à trouver la voie. »
Cédric ouvrit les yeux. C’était une sensation très étrange car il croyait les avoir gardés ouverts. Il laissa échapper une grimace, sa brume continuait de virevolter paresseusement comme si de rien n’était. Le garçon considéra néanmoins sa vision comme un encouragement. Il tenta de faire le vide dans son esprit pour se concentrer le plus fort possible sur son petit brouillard. Derrière lui, monsieur Apowain rangeait un petit pendule dans sa sacoche de ceinture.
Lorsque l’heure fut arrivée de quitter le monde magique pour rentrer chez lui, Cédric arrivait à diriger les filaments de brume pour en faire une petite boule. Le professeur le félicita de son assiduité et lui conseilla de ne pas négliger ses devoirs au profil de l’apprivoisement de son catalyseur. Le garçon blond acquiesça poliment et s’en fut rapidement pour retrouver ses amis qui allaient quitter la salle d’étude.
« Ca s’est bien passé ? Lui demanda Stéphanie avec sollicitude en voyant qu’il n’arrivait pas en sautant de joie.
– J’ai réussi à la faire bouger un peu, la rassura Cédric. Mais pas beaucoup plus !
– C’est un bon début alors ! » Se réjouit son amie brune. Ils se dirigèrent tous ensemble vers la sortie et le miroir, après avoir fait une pause aux casiers. Alors que les trois originaires du monde sans magie s’apprêtaient à dire au revoir à Jérémy, celui-ci leur adressa un regard mouillé et leur déclara :
« Un de ces jours, je vous inviterai à rester à la maison et on passera de supers moments ! Je vous montrerai le monde magique, ça va vous plaire ça je pense.
– Tu sais que tu vas nous revoir demain matin ? Le taquina Valentine.
– Oui, mais vous partez tous les trois sans moi et je me sens exclu du coup…
– Boah, tu sais, on se sépare presque tout de suite, le rassura Cédric. Mais si tu veux, je pourrai aussi t’inviter un de ces jours.
– Oh, c’est vrai ? S’illumina Jérémy. Tu me ferais visiter le monde sans magie et tout ? Il paraît que vous avez plein d’objets pour remplacer la magie.
– Oui, je pense que ça peut se faire ! »
Ainsi requinqué, le garçon brun consentit à leur dire au revoir et s’en fut de son côté. « Allez, on se dépêche, leur lança laconiquement le surveillant du moment. On se dépêche et on fait attention à ceux qui passent en sens inverse… » [rajouter avant une mention pour les gens du monde magique qui vont étudier dans le monde non magique] Lorsque leur tour arriva, les trois amis attendirent que le groupe en sens inverse émerge du miroir pour y entrer à leur tour. Comme les autres fois, Cédric et Stéphanie laissèrent Valentine à la sortie du collège des Alouettes et firent une partie du trajet ensemble.
Stéphanie déplorait toujours que sa loutre ne soit plus qu’un objet inanimé de ce côté. Cédric la rassura en lui disant que lorsqu’elle maîtriserait mieux la magie, elle parviendrait certainement à garder son animal sous sa forme de chair et de sang malgré le faible taux de magie ambiante. Son amie hocha affirmativement la tête, mais restait pensive. « Et puis au moins, continua le garçon, toi tu le vois ton catalyseur ici !
– C’est vrai, désolée. »
Il avait raison : on devinait à peine la moindre brume autour des pieds de Cédric. Et encore, Stéphanie se demandait si elle ne l’imaginait pas parce qu’elle était au courant qu’il devait y avoir du brouillard. Pendant qu’ils discutaient, la fillette brune devenait distraite et regardait régulièrement derrière eux. « Qu’est ce qu’il y a ? S’enquit son ami.
– Je ne sais pas, hésita Stéphanie. J’ai l’impression qu’il y a quelqu’un, mais je ne vois personne…
– Je n’ai vu personne non plus.
– J’ai l’impression d’entendre quelqu’un… »
Cédric tendit l’oreille. Il savait que son amie avait l’ouïe particulièrement fine et si elle disait qu’elle avait entendu quelqu’un, il y avait de grandes chances pour que ça soit vrai. Ils s’arrêtèrent pour fouiller le crépuscule du regard. Au bout d’une minute, ne voyant rien et Stéphanie indiquant qu’elle n’entendait plus rien, ils reprirent leur trajet. En marchant plus vite cette fois.
Une fois rentré dans la sécurité de chez lui, Cédric oublia totalement l’incident. Et, comme il n’avait pas pu faire ses devoirs dans son entêtement à maîtriser son catalyseur, il décida de regarder au moins les leçons qu’il avait à voir. Il se garderait les exercices pour l’étude du lendemain s’il n’avait pas le courage de s’en occuper.
Il n’avait pas encore besoin de magie pour les devoirs : les professeurs leurs avaient dit qu’ils attendaient que les élèves aient acquis suffisamment de bases en terme de catalyse de magie. Les apprentis-magiciens du monde non magique pouvaient encore faire leurs devoirs chez eux. Pas que ça réjouissait particulièrement Cédric, mais il se disait qu’il pourrait encore utiliser du temps d’étude pour apprendre à maitriser sa brume sans être encore pénalisé.
1284 mots pour aujourd’hui, en espérant que ça redeviendra plus productif dès demain !