Cédric commençait à se sentir émoustillé à l’idée d’être un magicien. N’était-ce pas là le rêve de tout le monde ? Il avait été impressionné par la démonstration de monsieur Morin qui avait fait apparaître des flammes dans sa main et celle de madame Dumoulin qui avait ravivé une plante verte en berne dans un coin de la salle. Le garçon était impatient de pouvoir faire des tours aussi époustouflants. Il était d’ailleurs en train de se concentrer pour faire apparaître du feu dans le creux de sa paume mais, à sa grande déception, rien ne se produisit.
« Souvenez-vous, précisa le directeur, et là je m’adresse aux futurs collégiens, qu’il y a peu de chance que vous parveniez à pratiquer la magie de ce côté-ci du miroir avant au moins l’année prochaine.
– Pourquoi donc ? S’enquit madame Legrand d’un ton incrédule.
– Parce qu’il y a très peu de magie à utiliser de ce côté, expliqua patiemment monsieur Morin. Il est donc très difficile de la capter pour des débutants. Malheureusement, il y en a juste assez pour pouvoir provoquer des accidents si la magie n’est pas maîtrisée. »
La mère de la fillette blonde ne parut pas convaincue. Sa fille, sans doute excédée de faire ainsi remarquer, leva les yeux au ciel et chuchota à madame Legrand d’arrêter d’intervenir. Cédric se sentit compatissant envers sa future camarade. Pour le moment, son père n’avait rien dit, mais il semblait ne pas moins en penser. Il assistait silencieusement à la réunion, les bras croisés et un air sérieux sur son visage. Le garçon estima que monsieur Legrand attendait d’être rentré pour exposer son point de vue à sa femme et sa fille. Son propre père agissait parfois ainsi.
A la fin de la réunion, quelques parents restèrent à l’extérieur de la mairie pour discuter de ce qu’ils venaient d’apprendre. « Je ne suis toujours pas entièrement convaincu, déclara le père de Cédric.
– Je pense que tu devrais, lui dit la mère de Stéphanie. Il y a le logo du ministère de l’Education de partout sur ces papiers. Ca semble plutôt officiel !
– Oui, mais c’est un peu bizarre quand même, insista Jérôme Berger. La magie n’est pas réelle ! »
Cédric se désintéressa de la conversation : il était lui-même convaincu et vu que les papiers avaient l’air officiels, il se disait que ses parents finiraient par se rendre à l’évidence. Stéphanie paraissait être du même avis et entraîna son ami plus loin, à la rencontre de la fillette blonde qui s’était éloignée de ses parents qui discutaient avec animation. En les voyant arriver, elle leur adressa un sourire timide.
« Bonjour ! Lui souhaita Stéphanie. Quelle drôle de nouvelle, n’est ce pas ? Moi c’est Stéphanie et lui, c’est Cédric.
– Moi, c’est Valentine, se présenta la fillette blonde. Je crois que mes parents ne sont pas très contents que je sois une magicienne.
– Ce n’est pas comme si tu l’avais décidé, nota le garçon.
– De toutes façons, c’est ce que j’aurais décidé quand même, précisa Valentine en souriant. Ca a l’air intéressant d’être une magicienne !
– Je trouve aussi, s’exclama joyeusement Stéphanie. Je suis impatiente de commencer, mais il y a les vacances avant.
– Oui, acquiesça Cédric. Mais c’est quand même vachement chouette les vacances. »
Il était aussi impatient de partir voir l’océan que de devenir un collégien magicien. Les deux filles allaient aussi passer des vacances au bord de l’eau salée, mais pas au même endroit que lui. En revanche, ils découvrirent que Stéphanie et Valentine allaient se retrouver au même endroit, ce qui réjouit les concernées. Les trois enfants continuèrent de parler de leurs futures vacances, jusqu’à ce que leurs parents les appellent pour rentrer chez eux.
Les parents de Cédric restèrent silencieux et pensif pendant le trajet. Une fois arrivés chez eux, Céline et Carine les accueillirent joyeusement en demandant à quoi avait servi cette réunion. « Et bien, commença Anne Berger après avoir échangé un regard avec son mari, en fait Cédric ne va pas étudier au même collège que toi.
– Ah bon ? S’étonna Céline. Mais pourquoi ?
– Pourquoi ? Renchérit la petite Carine qui paraissait déçue de savoir qu’il était possible de ne pas fréquenter les mêmes écoles que son frère et sa sœur. »
Jérôme et Anne s’entre regardèrent encore, prirent une grande inspiration et expliquèrent à leurs filles que leur frère allait étudier dans une école spéciale. « Une école spéciale ? Répéta Céline. Pourquoi ?
– Il est pas assez intelligent pour aller dans une école normale ? Proposa Carine qui affichait une mine concernée du haut de ses sept ans.
– Si si, lui assura leur père. C’est juste qu’il a certaines capacités qui nécessitent une école particulière. »
Les deux sœurs hochèrent gravement la tête en signe d’acquiescement. Un peu gêné par le tour que prenait la conversation, Cédric intervint : « Mais c’est pas grave, hein ! Je vais faire de la magie, c’est super cool !
– Oooh, s’exclama la benjamine ravie. Moi aussi je veux faire de la magie !
– Euh, ce n’est pas vraiment quelque chose qu’on peut décider, balaya Anne. Nous verrons ça quand tu devras entrer au collège. »
Céline paraissait sceptique malgré les explications. Ne sachant comment réagir, elle resta silencieuse alors que Carine babillait et posait tout un tas de questions, dont certaines auxquelles ses parents et son frère eurent du mal à répondre. A un moment, Jérôme et Anne coupèrent la conversation, car la famille devait finir de préparer les bagages pour partir en vacances le lendemain matin.
[probable coupure de chapitre]
Les affaires de vacances venaient d’être rangées, l’océan n’était plus qu’un souvenir et Cédric était obnubilé par sa rentrée prochaine. Maintenant qu’elle était proche, il était de plus en plus curieux de savoir en quoi consistait la vie d’un collégien magicien. Quelque part au fond de lui, une petite voix inquiétante lui chuchotait que, si ça se trouve, ce n’était qu’une vaste blague.
Pour se rassurer, il demanda à ses parents s’il pouvait inviter Stéphanie à passer l’après-midi avec lui au parc public qui entourait la mairie. Ils acceptèrent, de même que ceux de son amie, à la grande joie des deux enfants. Le parc était proche des deux foyers et Cédric et Stéphanie s’y retrouvèrent quelques minutes plus tard.
« Il faut qu’on parle, décréta la fillette aux cheveux châtains.
– Je suis d’accord, approuva le garçon.
– J’en ai parlé à Valentine pendant qu’on était en vacances au même endroit et…
– Valentine ?
– Oui, tu sais, la fille blonde qui était à la réunion avec nous, celle avec la maman pénible, lui rappela Stéphanie.
– Ah, oui. Je me souviens !
– Et bien je lui parlais de Lucas qui, lui, va aller au collège des Alouette de ce côté. Et elle m’a demandé si on lui avait parlé du fait que toi et moi n’allions pas être avec lui.
– On a pas eu le temps, réalisa Cédric. Il ne sait pas que nous ne serons pas avec lui…
– Exactement. Sauf que je ne sais pas si nous devons lui en parler ou pas.
– Il risque de nous prendre pour des fous, c’est ce que la directrice a dit pendant la réunion. »
Les deux amis réfléchirent un instant à cette implication. Ni l’un ni l’autre n’avait très envie que Lucas les prenne pour des fous, mais ils n’avaient pas non plus envie de lui mentir. Le problème était épineux. « Il va voir que ni toi ni moi ne sommes là à la rentrée, déclara Stéphanie.
– Et il va nous en vouloir de ne pas lui avoir raconté, prophétisa sombrement Cédric. En tous cas, je pense que je nous en voudrais à sa place. »
Ils méditèrent encore un peu sur la question mais, ne sachant quelle décision prendre au sujet de Lucas, leur discussion dériva sur leur prochaine rentrée. La fillette s’inquiétait qu’ils n’aient pas reçu de liste des fournitures. Heureusement, Cédric avait la réponse : sa mère lui avait dit que le collège des Alouettes de l’autre côté du miroir leur fournirait tout ce dont ils auraient besoin. Ils passèrent le reste de leur conversation à essayer de deviner comment ils allaient vivre leur vie de collégiens magiciens.
Une semaine plus tard, c’était le grand jour. Anne et Jérôme Berger semblaient aussi nerveux que leurs fils. Pour eux aussi l’entrée au collège de magie était un saut dans l’inconnu. Jérôme avait pris sa matinée pour amener Cédric au collège. Le directeur Morin avait expliqué que l’entrée se trouvait au sein du collège des Alouettes de leur côté et cela était répété à plusieurs endroits sur les papiers d’information.
Leur chemin croisa celui de Stéphanie qui se rendait aussi au premier jour de rentrée accompagnée de son père. Les deux papas avaient décidé qu’ils passeraient un moment ensemble non loin du collège, au cas où il y ait un souci. Ils tâchèrent de ne pas le montrer à leurs enfants, mais ils n’étaient pas très à l’aise avec le concept de collège de magie.
Les futurs magiciens étaient les seuls à faire leur rentrée ce jour là. Une personne les accueillit à l’entrée du collège des Alouettes et leur indiqua un bâtiment dans lequel ils devaient se rendre. Après un instant d’hésitation, les deux pères suivirent curieusement leurs enfants au sein de la cour de l’établissement, jusqu’au bâtiment indiqué. La directrice Dumoulin les attendait dans une grande salle vide, dans laquelle trônait un immense miroir, encadré de moulures qui étaient sculptées de petits personnages et de feuilles entrelacés.
« Bonjour, leur dit-elle. Je suis désolée mais, à partir d’ici, seuls les élèves sont autorisés à continuer. » Un peu déçus, Jérôme et Marc firent leurs dernières recommandations. Madame Dumoulin attendit patiemment qu’ils aient terminé, puis indiqua le miroir aux deux enfants. « Veuillez entrer. Ne vous inquiétez pas, cela ne fait pas mal. »
Après un dernier regard en direction de leurs parents, Cédric et Stéphanie se dirigèrent en direction de l’objet qui était plus haut et plus large qu’une porte. Ils voyaient leurs reflets afficher une mine peu rassurée et s’efforcèrent de reprendre un peu contenance. Se prenant la main l’un de l’autre par réflexe, ils prirent une grande inspiration et passèrent de l’autre côté du miroir.
1713 petits mots pour aujourd’hui, je pense qu’il faut que j’agrandisse ma liste de prénoms et de noms de famille que je vais utiliser. Et j’ai déjà noté des trucs à rajouter dans mon carnet.