NaNoWriMo 2016 : Arkhaiologia Jour 24

Ce dernier afficha une mine déçue. Il poussa un profond soupir.

« Je comprends, déclara-t-il finalement. Même si je dois dire que je trouve tout cela tellement passionnant qu’il est presque douloureux d’y renoncer.
– Allons Nicolas, le gourmanda Ethelle. Ne vous montrez donc pas si dramatique ; ces envolées lyriques ne fonctionnent que pour le théâtre.
– Vous avez raison, concéda aimablement Merryweather. Je devrais me montrer plus raisonnable. Après tout, vous êtes les professionnels ici et je m’en voudrais d’interférer dans votre travail.
– Je vous remercie pour votre considération, lui dit plaisamment Simon.
– Oh, c’est tout à fait normal, balaya Nicolas. Seulement, j’aimerais que vous me promettiez une chose, vous trois.
– Quoi donc ? S’enquit curieusement Clay.
– Que vous me laisserez être le premier visiteur de votre grandiose découverte.
– Vendu ! S’exclama joyeusement l’archéologue. Vous serez le premier touriste à avoir la chance de visiter ces ruines antiques ! »

Ils trinquèrent à cette promesse. Puis ils trinquèrent de nouveau et profitèrent du dessert. Clay se montra particulièrement joyeux après tout cet alcool ingéré. De plus, il n’avait jamais mangé autant de toute sa vie. Il avait l’impression qu’il allait en être malade, mais il en était heureux néanmoins. Pour lui, avoir décidé de quitter les Faucheux en compagnie d’Ethelle était la meilleure idée qu’il avait pu avoir. Ses conditions d’existences s’étaient grandement améliorées depuis et il s’en trouvait tout à fait satisfait. Il s’était aussi mis d’accord avec Simon, pendant leur exploration de la bibliothèque, que celui-ci lui enseignerait les bases de l’histoire antique, pendant qu’Ethelle lui apprendrait à lire et à écrire. Il comptait devenir un spécialiste de cette civilisation qui avait inventé tellement de choses. Le jeune homme avait fini par tomber amoureux de ces mystérieux ancêtres et sa curiosité pour eux était devenue dévorante.

Il avait été soulagé que Simon décline la venue de Merryweather dans la bibliothèque. Pas qu’il n’appréciait pas leur hôte, au contraire. Il trouvait Nicolas très sympathique, là n’était pas le problème. Clay se sentait juste mal à l’aise à l’idée que quelqu’un d’autre vienne s’immiscer dans la bibliothèque, leur bibliothèque. L’ancien Faucheux se sentait très protecteur vis à vis de la découverte de Derrington. Et il réalisa qu’il n’aimait pas l’idée que des intrus pourraient y entrer à leur tour. Cela ne le dérangeait pas que Simon et Ethelle viennent y vaquer à leurs occupations, au contraire. Concernant l’archéologue, c’était surtout son territoire à lui. Quant à la rouquine, ils avaient découvert cet édifice de savoir ensemble. Pour lui, elle y avait tout à fait sa place. Et puis, sa présence le rassurait lors des apparitions de scènes fantomatiques, même si ces souvenirs vivaces du passé l’inquiétaient également.

En fait, il était impatient de retourner là-bas. Surtout maintenant qu’Ethelle l’avait bien réapprovisionné en carnets et crayons et qu’il avait de quoi s’éclairer à profusion. Même avec les apparitions ; elles le surprenaient à chaque fois, mais il était certain qu’elles contenaient plein d’informations à exploiter. Il se souvenait encore de la scène de la première nuit qu’ils avaient passé dans la bibliothèque, lorsque les jeunes gens paraissaient discuter et rire tout en utilisant la mystérieuse boîte métallique. Après en avoir discuté avec Simon le lendemain, ils avaient pris sur eux de l’ouvrir. Ce qui les avait décidé était qu’ils en avaient trouvé d’autres un peu de partout dans le bâtiment. Armé d’un pied de biche, c’était Clay qui avait eu l’honneur de forcer la porte. Certains des restes présumés de nourriture s’effritèrent sous le choc de la vibration. Une fois ouverte, la boîte recelait toujours bien des trésors. Par exemple, ils firent l’inventaire complet et stockèrent du mieux qu’ils purent les emballages qu’ils supposaient de nourriture et de boisson. Et, surtout, ils avaient eu l’occasion d’étudier le mécanisme intérieur du placard à provisions. Ils ne parvinrent pas à le faire fonctionner – l’appareil devait avoir besoin d’énergie – mais firent l’hypothèse qu’il se contentait de distribuer de la nourriture ou de la boisson en échange d’argent.

Au delà du fait que Simon lui avait permis de garder quelques pièces antiques en guise de récompense, Clay avait été enchanté de cette découverte. Le fait de savoir à quoi servaient ces buffets de métal, l’aidait à lui donner une idée de comment vivaient les gens à cette époque. Il pouvait les imaginer déambuler dans cette enceinte de connaissances, lisant et étudiant aux étages supérieurs, assistant à il ne savait quel genre de représentation au sous-sol, faisant une pause pour acheter des en-cas aux machines… Il avait même commencé à dessiner des scènes de vie qu’il pensait être probables au sein de la bibliothèque, en plus d’essayer d’immortaliser les scènes fantomatiques auxquelles ils avaient la chance – et la terreur parfois – d’assister. Découvrir ce genre de choses avait été une véritable révélation pour l’ancien gamin des rues qu’il était. Il n’avait jamais participé à une activité aussi passionnante. Peut-être était-ce pour cette raison qu’il rechignait à partager une chose aussi importante avec d’autres.

Réalisant qu’il s’était laissé absorber par ses pensées, il secoua la tête et se concentra de nouveau sur la conversation. Celle-ci n’était plus que badinage sur divers sujets qui ne parlaient absolument pas à Clay, comme l’entretien que nécessitait une propriété telle que celle des Merryweather par exemple. Ethelle parut remarquer son manque d’intérêt pour le sujet et lui adressa un sourire complice, auquel il répondit instantanément. Depuis qu’ils s’étaient rencontrés la première fois au parc des Deux Ormes, l’attitude de la jeune femme avait beaucoup changé à son égard. Elle était devenue moins hautaine et distante. A force de discuter de la bibliothèque et de faire des découvertes ensemble, ils s’étaient beaucoup rapprochés. Eux et Simon avaient désormais un lien unique et très fort, forgé par l’élucidation des mystères de cette civilisation et le partage d’un secret connus que d’eux-mêmes. Clay corrigea mentalement cette dernière assertion : en réalité Derrington voulait que d’autres soient au courant. Il pressentait que la ré-émergence du surnaturel pouvait être un danger pour leur propre civilisation. Malheureusement, personne ne l’avait cru jusque là, ce qui était aussi une des raisons pour lesquelles il réunissait des preuves.

La soirée, fort agréable au demeurant, finit tout de même par arriver à sa fin. Nicolas leur proposa de passer une confortable nuit sur place, dans les douillettes chambres de son manoir. L’idée tenta grandement Ethelle. Comme ses deux compagnons et elle dormaient tout le temps dans la même pièce, elle n’aurait pas refusé de passer du temps à dormir toute seule pour une fois. Mais, comme elle s’y attendait, Simon refusa poliment. Il invoqua le fait qu’ils allaient devoir repartir à la bibliothèque d’ici peu de temps et que, si ils restaient ici, le lieu était tellement agréable qu’ils n’en repartiraient jamais. « Cela ne me dérangerait pas de vous garder à vie, déclara Merryweather. Ce n’est pas tous les jours que j’ai l’occasion d’avoir des hôtes aussi agréables !
– Vous nous flattez, le gourmanda la rouquine en remuant un doigt accusateur.
– Si peu, contra Nicolas avec un fin sourire. Quoiqu’il en soit, même si j’aurais bien aimé vous garder plus longtemps, je vous souhaite une bonne nuit mes chers hôtes, ainsi qu’un bon voyage de retour à vos fouilles ! »

Les trois explorateurs le remercièrent chaudement et s’en furent, dans la voiture de location que le majordome leur amena. Clay et Ethelle somnolèrent durant tout le trajet qui les mena au wagon maison de Simon. Ce dernier, qu’il était fatigué lui-même ou qu’il était conscient de leur fatigue à eux, les laissa tranquilles. Sur le bord de la route, une forme blanche lui fit signe de s’arrêter. Bien sûr, l’archéologue connaissait bien son folklore et savait qu’ils ne valait mieux pas faire confiance aux Dames Blanches. Il ne s’arrêta pas pour elle et ne prit même pas la peine de déranger ses deux jeunes compagnons pour qu’ils puissent l’admirer. Après tout, si il avait raison – et il avait certainement raison, estimait-il – ils auraient bientôt l’occasion d’admirer beaucoup d’autres specimens de spectres et de faire connaissance avec leurs spécificités. En revanche, beaucoup de personnes allaient se faire avoir. Qui avait encore l’habitude de côtoyer les fées de nos jours ?

Les trois vaillants explorateurs se levèrent tard le lendemain. Leur soirée avait été plus arrosée que ce dont ils avaient l’habitude. Mais ils avaient décidé qu’ils étaient en congés ; aucun ne se formalisa de leur manque de sérieux. Malgré cela, Simon se plongea tout de même dans ses carnets et certains des livres de sa bibliothèque intramurale personnelle. Il expliqua à ses deux apprentis qu’il avait certaines choses à vérifier, mais qu’eux pouvaient faire ce dont ils avaient envie. Ethelle et Clay échangèrent un regard, puis décidèrent d’un commun accord d’aller se promener ensemble dans la ville. Lors de leurs pérégrinations, ils apprirent qu’un cercle de menhirs se dressait dans un des pars de la petite cité. Curieux de savoir si eux, archéologues en herbe, pouvaient en tirer des informations, ils s’y rendirent avec enthousiasme. Ils étaient conscients qu’ils étaient désormais plus connaisseurs dans une autre forme d’antiquité, mais ils étaient tout autant intéressés de savoir ce qu’ils pouvaient tirer des menhirs.
Le parc n’était pas très étendu. Il consistait surtout à une petite étendue d’herbe plantée de quelques bancs et qui entourait un tertre tout aussi herbeux, sur lequel étaient plantés des pierres en cercle. Les deux jeunes gens s’approchèrent des menhirs pour les inspecter. « Clay ! Appela Ethelle qui s’était accroupie au pied de l’un d’eux. J’ai trouvé des inscriptions gravées… Penses-tu pouvoir les dessiner pour les montrer à Simon ?
– Mmmh, c’est difficile de les voir, commenta l’ancien Faucheux qui était venu voir par dessus son épaule. Mais je peux peut-être en faire une empreinte.
– Oui, la pierre a été bien érodée. » Acquiesça la rouquine en caressant les gravures comme pour mieux distinguer leurs contours.

Soudain le sol, sous leurs pieds, émit des vibrations grondantes. Comme si il y avait une mine sous terre et que des chariots roulaient à tombeau ouvert. Ethelle se redressa vivement, aidée par Clay qui la tira en arrière. Bien lui en prit : le sol sous le menhir parut s’ouvrir et en jaillirent, lancés au grand galop, de petits chevaux, pas plus hauts que des poneys, chevauchés par de petits cavaliers. Ils disparurent bientôt dans les rues citadines, créant une grande confusion sur leur passage. L’ouverture au pied du menhir, quant à elle, paraissait avoir disparu. Les deux apprentis de Derrington restèrent un instant interdits à rassembler leurs esprits. Maintenant que la clameur s’était calmée, ils en étaient à se demander si ils n’avaient pas rêvé. Mais les figures pâles qu’ils affichaient certifiaient le contraire.

 

 

1788 mots pour aujourd’hui, ce qui est plutôt nul pour un jeudi, mais bon.

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