– Tant pis pour toi, concéda l’homme. Je vais te blesser juste suffisamment pour que tu restes en vie et que je puisse t’amèner à mon maître. » Il arma son bras, levant haut son grande épée. Aussi vif que l’éclair, Bård tourna la tête de loup du pommeau de son épée. Celle ci s’illumina d’une lumière flamboyante auréolée de flammèches. Cela surprit l’assaillant une seconde, qui suffit à l’adolescent pour bondir et enfoncer sa lame enflammée dans l’aîne non protégée du meurtrier de son père. Celui ci hurla de douleur. Alors qu’une odeur de chair brûlée se répandait dans l’atmosphère, il laissa tout tomber et se tordit à terre de souffrance. Le garçon contemplait fixement son oeuvre, d’un air mi soulagé, mi horrifié.
Tandis que l’homme exhalait son dernier souffle après une douloureuse agonie, Bård se tourna vers sa protectrice. « Tu n’es pas intervenue.
– En effet, dit elle. Je t’ai vu jouer avec ton anneau, je me doutais bien que tu avais quelque chose en tête. Et puis cet homme… Disons que depuis ces sept ans qu’il m’avait éraflée, il a bien vieilli. Tu étais beaucoup plus vif que lui.
– Mais je manque d’expérience, c’est bien cela que tu vas me dire ?
– Oui, confirma la vane. Mais tu as su compenser ton manque d’expérience avec brio. » En entendant ce compliment, l’adolescent sourit avec fierté. Il nettoya et rangea son épée mais l’anxiété revint bientôt sur son visage encore juvénile.
« Fen, il a dit qu’il avait tué un aelfe avec une sorte de corne… Crois tu qu’il ait réussi à tuer Siegfried ?
– Tuer Siegfried ? » La louve découvrit ses crocs en un sourire ironique. « Et comment aurait il pu en se faisant tenir tête par son petit frère à peine sorti de ses couches ? Non non, je ne pense pas qu’il ait pu tuer Siegfried. Tout au plus a-t-il pu le blesser. De plus, cet homme aurait du amener ton frère encore vivant à Ull. Un cadavre d’aelfe n’a aucune utilité pour le Chasseur.
– C’est vrai, songea le garçon. Peut être qu’il avait réussi à le capturer grâce à un stratagème. Mais si c’était le cas, Siegfried a du parvenir à s’enfuir. C’est certain.
– T’inquièterais tu pour lui ? s’enquit Fen avec curiosité.
– Non ! s’exclama brusquement Bård. J’ai juste besoin de lui pour m’aider à ouvrir des portes.
– C’est cela oui, dit la louve sur un ton qui transpirait l’incrédulité.
– Tu ne me crois pas ! réalisa l’adolescent. Je t’assure que je ne m’inquiète pas pour ce bellâtre !
– Oui oui.
– Je t’assure que non, persista-t-il en reprenant sa place sur le dos de l’animal.
– Oui oui j’ai bien compris, continua la vane toujours aussi railleuse.
– D’ailleurs, en parlant de Siegfried, comment comptes tu le retrouver ? s’enquit le garçon en se disant que cette question suffirait à changer de sujet.
– Je compte tout d’abord visiter quelques lieux où ton frère aime se rendre et que je connais, exposa la louve en se mettant en route afin de laisser leur carnage deerrière eux le plus rapidement possible. Ensuite, si nous ne le trouvons nulle part, c’est qu’il sera probablement parti en guerre tout seul contre Ull.
– Tout seul ? Quel arrogant, commenta le petit frère.
– Certes. Et si il est parti tout seul en guerre contre Ull, il nous suffira de nous rendre là où l’hiver persiste. Car, comme tu le sais, Ull est un ase de l’hiver et la neige le suit de partout.
– Oui, je vois, acquiesça Bård. Si nous ne trouvons Siegfried nulle part, c’est qu’il s’est jeté en plein coeur de l’hiver. » Son jeune cavalier fermement arrimé à son pelage, Fen se mit à courir, comme seuls savent courir les loups : d’une allure souple et rapide qu’elle pouvait maintenir des heures durant.
Elle se rendit d’abord sur le cours, encore gelé, d’un petit ruisseau. Mais elle eût beau renifler en tous sens, Siegfried n’était probablement pas venu ici depuis des lustres. En revanche… Elle sentit Bård se raidir sur son dos et l’entendit tirer lentement son épée de son fourreau. Lui aussi avait remarqué que les alentours se trouvaient bien trop silencieux. Quelque chose n’allait pas, qui devait se trouver sous le vent puisque la truffe expérimentée de la louve ne percevait rien du tout. Une flèche siffla à leurs oreilles. Fen bondit promptement dans les fourrés, quittant vite le danger de la zone dégagée. « Là bas. » Pointa l’adolescent en désignant un gros arbre. Fen aperçut l’archer. Elle fondit sur l’arbre, en zig zagant pour éviter les flèches, et Bård bondit prestement sur la branche de leur ennemi une fois qu’il fut à portée. Maintenant elle les voyait, ceux qui tendaient l’embuscade. Elle en déchira quelques uns, lorsqu’une masse percuta son flanc, l’envoyant rouler près du ruisseau gelé. Lorsqu’elle se releva, elle constata qu’elle se trouvait encerclée par des hommes avec des piques et qu’un renard, presque aussi grand qu’elle, lui faisait face.
« Tu es cernée, l’informa plaisamment le renard.
– J’avais remarqué, rétorqua-t-elle en grondant.
– Pourquoi tant d’agressivité ? déplora le fin goupil.
– Peut être parce que je me suis faite attaquer, suggéra la louve.
– C’est vrai, concéda l’autre vane. C’est pourquoi je vais te proposer de repartir sur de bonnes bases. Viens avec moi et je te présenterai à mon maître, Ull. Une puissante louve telle que toi trouvera certainement une place de choix à ses côtés.
– Oh mais je ne doute pas qu’il veuille me tuer afin d’absorber ma puissance, gronda Fen.
– Ah. Ainsi tu es au courant du grand dessein du maître. Tu devrais donc te précipiter afin de participer à ce nouveau futur sans Ragnarök.
-Pourquoi ne le fais tu pas toi même ? le railla la louve. Je n’ai pas l’intention de mourir pour nourrir le caprice d’un fou.
– Tes mots sont vraiment durs, protesta le renard de sa voix de velour. C’est fort dom… » Il fut interrompu par le cri de l’un des hommes qui encerclaient Fen. « Comment… ? » S’étonna-t-il alors qu’un autre de ses sbires tombait dans la neige en hurlant de douleur, mortellement blessé d’une flèche bien placée.
« Ah, ces loups solitaires, commenta Fen avec une ironie mordante, ils ne sont plus ce qu’ils étaient. » Sur ces propos sibyllins elle se jeta, tous crocs dehors, à l’assaut du renard qui glapit de surprise. Les hommes qui encerclaient précédemment la louve s’étaient égaillés en tous sens, cherchant désespérément à se mettre à l’abri des flèches mortelles qui s’abattaient sur eux. Certains, qui étaient parvenus à se mettre à couvert, commencèrent à en chercher l’origine, mais elles semblaient provenir de toutes parts. Le vane renard se défendait bien ; il était agile et rusé. Mais la louve se trouvait également une combattante expérimentée. Elle avait déjà battu son content de renards, lynx, ours et autres prédateurs qui en voulaient à ses proies. Il lui mordit profondément la patte avant. En réponse, elle lui planta fermement ses crocs dans l’échine afin de le jeter au loin. Blessés tous les deux, la louve était consciente qu’elle avait encore moins d’agilité que son adversaire, avec sa patte ensanglantée qu’elle ne pouvait presque plus poser par terre. Il était temps d’en finir ; un combat qui s’éternisait pouvait devenir très dangereux. Elle vit que son opposant avait eu la même réflexion. Néanmoins, elle avait toujours l’avantage de la force, ce que devait aussi savoir le renard, mais aucun des deux n’avait plus le choix à présent.
Ils s’élancèrent l’un contre l’autre pour un ultime assaut. Fen parvint à se frayer un passage jusqu’à la gorge du renard, qu’elle mordit avidement avant de le plaquer sur le sol neigeux. Lorsqu’elle desserra son étreinte, son adversaire était encore vivant mais haletait, à l’agonie. « Tu veux savoir pourquoi je capture d’autres vanes pour Ull, n’est ce pas ? souffla-t-il. Je n’ai pas vraiment eu le choix. Il sait où se trouve ma tanière avec ma renarde et mon renardeau. J’ai du lui proposer ce stratagème afin qu’il leur laisse la vie sauve.
– Il aurait fini par tous vous tuer quand même, pointa la louve.
– J’aurai bien… trouvé… un stratagème… » Emit le renard avant que la vie ne le quitte totalement. Fen réprima son envie de pousser un hurlement de loup déchirant. Que de gaspillage de vies.
Elle n’eût pas le temps de s’apitoyer plus avant qu’un filet gigantesque s’abattit sur elle. Fen avait négligé les petits humains qui accompagnaient le vane renard et ceux ci n’étaient pas restés inactifs. Le filet était solide et ni ses crocs, ni ses griffes, ne parvinrent à le déchirer. Ils l’avaient de nouveau encerclée, piques en avant, mais se tenant désormais à une distance raisonnable, tout en restant le plus possible à l’abri des flèches meurtrières qui continuaient de s’abattre sur eux. « Il est là ! » s’exclama soudain l’un d’entre eux en désignant un arbre. « Il se déplace ! » ajouta un second. La louve s’inquiéta : ils avaient fini par repérer son protégé et elle ne pouvait rien faire pour l’aide. Le moindre mouvement qu’elle esquissait l’empêtrait plus dans le filet. Elle gronda de manière menaçante, en espérant attirer l’attention sur elle. Peine perdue, ils étaient suffisamment nombreux pour se répartir les tâches.
Voguant de branche en branche avec agilité, Bård était assez satisfait de lui même. Après avoir égorgé l’archer que Fen l’avait aidé à atteindre, l’adolescent s’était emparé de son arc. Et, après avoir éliminé tous les autres archers qu’il avait pu repérer, s’était occupé de bombarder les assaillants de la louve de flèches. Par contre, à présent que la vane se trouvait prisonnière d’un filet et que ses assaillants l’avaient repéré, il se sentait un peu moins glorieux. Heureusement, il avait encore pour lui d’être plus agile qu’eux et de pouvoir se mouvoir d’arbre en arbre avec presque autant d’aisance qu’un écureuil. Tout en se moquant de ses poursuivants, il réfléchit. Il devait absolument délivrer Fen. Il n’avait pas besoin d’éliminer tout le monde – encore faudrait il le pouvoir – puisqu’une fois qu’elle serait sortie du filet, ils pourraient s’enfuir tous les deux et facilement semer leurs poursuivants. Malheureusement, l’endroit où se trouvait la vane était envahi d’ennemis. La situation devenait trop intenable, lui même commençait à se faire submerger. Il n’était plus temps de réfléchir. Il lâcha l’arc, bondit d’arbre en arbre jusqu’au dessus de Fen, et se laissa tomber sur elle, s’employant à déchirer le filet de son couteau. Revenant de leur surprise et comprenant ce que cherchait le garçon, les hommes armés de piques commencèrent à s’approcher de la louve. Après tout, maintenant ils n’avaient plus besoin de rester à couvert puisque l’archer qui décimait leurs rangs était bien en vue, et ne possédait plus d’arc. Bård s’échina sur les mailles du filet avec l’énergie du désespoir.
Au moment où Fen allait se faire embrocher par des piques agressives, l’intégrité de sa prison se désagrégea et elle bondit en dehors, faisant chuter son sauveur dans sa précipitation. Elle prit juste le temps de le soulever dans sa gueule, comme lorsqu’il était petit, sauta par dessus les rangs piqueux et s’enfuit dans la forêt avec l’adolescent. A cause de la morsure qui la faisait souffrir à la patte, elle ne courut pas très longtemps. Juste suffisamment pour se soustraire aux éventuelles poursuites des humains. Elle déposa délicatement Bård sur le sol et entreprit de lécher ses blessures avec application. « Et bien ! Quelle embuscade ! s’exclama l’adolescent. Penses tu que nous étions attendus ? Ou qu’ils attendaient Siegfried ?
– Nous, lui, ou n’importe quelle autre créature dont Ull pourrait s’arroger le pouvoir, répondit la louve. Je ne pense pas que nous étions visés en particulier. Ce ruisseau est un endroit ou de nombreux vanes et aelfes apprécient de se retrouver. Parfois même les dvergs.
– Pourquoi y avait il un vane avec ces crapules ? demanda-t-il ensuite.
– Parce que pour protéger sa famille, il a du s’allier à Ull et lui amener de quoi devenir plus puissant.
– Oh. » Bård s’interrogea sur ce qu’il aurait fait à la place du renard. Il n’en avait aucune idée. Son premier réflexe aurait été de confronter Ull. Mais un tel chantage changeait assurément la donne. Son regard tomba sur la morsure profonde que sa protectrice arborait à la patte. Il entreprit de la nettoyer avec de la neige et écopa d’un coup de langue affectueux.
« Bon ! lâcha la louve. Je pense que ma première idée pour retrouver ton frère tombe à l’eau. De plus, il a du se retrouver confronté au même type de déboire que nous.
– Comment allons nous le trouver dans ce cas ?
– Je ne sais pas, avoua la vane. Suivre ma deuxième idée je présume. Chercher la neige jusqu’à tomber sur lui.
– Cela me parait hasardeux, commenta l’adolescent.
– A moi aussi. Mais avec un peu de chance, nous pourrons rencontrer Svart ou Mørk. Ceux là sauront certainement où se trouve Siegfried. » Dans tous les cas, ils n’avaient pas vraiment de choix plus attirant.
« Avant cela, nous devrions peut être mettre encore plus de distance entre nous et ces fils de catin qui nous poursuivent probablement, suggéra Bård. Ainsi tu pourrais te remettre un peu de tes blessures.
– Faisons cela, c’est une bonne idée. » Estima Fen. Le garçon monta de nouveau sur son dos et, en boitillant, la louve aborda un petit trot efficace. Ils sortirent de la forêt pour longer un affleurement montagneux. La vane émit soudain un petit bruit de satisfaction en voyant au loin ce qui paraissait être l’entrée d’une grotte. L’adolescent se réjouissait aussi, il avait bien envie d’une pause. Cela avait beau être leur premier jour de voyage, ils avaient déjà des blessures à panser et essuyé deux combats. Il espérait que la suite ne serait pas aussi mouvementée.
« Tu sais, déclara-t-il à la louve une fois qu’ils se furent installés à l’abri, je pense que nous devrions essayer de nous montrer particulièrement discrets.
– C’est également mon avis, acquiesça la vane.
– Du coup, je pense que nous devrions nous promener à pieds d’homme, si tu vois ce que je veux dire.
– Je ne sais pas si cette proposition me plait, repartit Fen qui préférait sa forme lupine.
– Je m’en doute bien, tempéra le garçon. Mais une louve géante telle que toi ne passe pas inaperçue, surtout pour des gens qui en recherchent activement. De même que je ne passe pas inaperçu non plus en chevauchant une telle monture.
– Je ne suis pas une monture, signala la louve. Je te porte parce que j’en ai envie, pas parce que tu m’as dressée à le faire.
– Oui oui, je sais bien, mais tu vois ce que je veux dire.
– Oui, ronchonna la vane que la douleur sous jacente de sa blessure rendait un peu bougonne.
– Je vais soigner la morsure de ta patte, précisa l’adolescent. Mais avant il faudrait que tu te décides si tu prends ta forme humanoïde ou pas. Parce que tu sais bien que Beyla disait que tu vas mal cicatriser si tu changes sans cesse de forme. »
Fen claqua sa mâchoire et rétrécit. Tandis qu’elle devenait presque humaine d’apparence, Bård fouillait dans son sac à dos à la recherche de la petite trousse de soin que la femme du forgeron des étoiles avait laissé à leur intention. Ses oreilles pointues lui donnaient une apparence aelfique. Mais ses mains griffues, lorsqu’elle quittait ses gants, et ses crocs, lorsqu’elle souriait, ne laissaient aucun doute sur sa nature sauvage. Une fois qu’il eût trouvé ce qu’il cherchait, la vane releva sa manche et déclara en grimaçant : « Fait ton oeuvre, petit d’homme.
– L’avantage de te soigner lorsque tu fais cette taille, nota l’adolescent, c’est que je vais utiliser bien moins de bandages.
– Hmpf, grommela Fen en réponse.
– Allez, arrête de t’en faire, continua-t-il. Je pense que nous devrions inventer une histoire pour les gens qui nous poserons des questions.
– Bien que l’idée de croiser des gens ne m’enchante pas, je pense que tu as raison, concéda la vane. Nous devrions être parés à toute éventualité. Je dois dire que je n’avais pas mesuré que le monde se trouverait dans un tel chaos. J’ai peut être trop attendu.
– Peu importe, balaya Bård avec l’insouciance propre aux personnes de son âge. Veux tu être ma soeur ou ma mère ou ma tante ? » L’idée paraissait l’enchanter. Beaucoup plus qu’elle n’enchantait Fen.
« Je ne te ressemble pas assez pour être ta mère ou ta soeur, finit elle par dire. En revanche je pense que je peux passer pour être ta tante.
– Va pour ma tante ! se réjouit l’adolescent en terminant de bander la blessure de sa nouvelle tante auto proclamée. Et, du coup, tu serais la soeur de mon père ou de ma mère ?
– Disons de ton père, puisque je l’ai bien mieux connu que ta mère, suggéra-t-elle.
– Oui mais nous ne cherchons pas forcément la vérité, rappela Bård.
– Tout mensonge est plus crédible s’il est proche de la vérité.
– Vraiment ? s’étonna l’adolescent. Et bien d’accord. Tu es désormais ma tante, soeur de mon défunt père. Comment aurait il pu mourir d’ailleurs ? Tué par un ours ?
– Oui, cela me parait crédible. Et ta mère serait morte en couches, ajouta la vane. Ainsi nous avons toute l’histoire.
– Elle est simple à retenir, cela ne va-t-il pas paraitre trop basique ?
– Bien sûr que si, et comme ça nous resterons discrets, expliqua Fen. Il n’y a rien de moins discret que des gens qui ont des vies romanesques à raconter.
– Mmmh, dommage, soupira le garçon. Mais en parlant de discrétion, tu devrais faire quelque chose pour dissimuler tes oreilles pointues. »
La vane fouilla dans ses poches et en sortit un bandeau qu’elle passa de manière à dissimuler les pointes de ses oreilles. « Est ce mieux ? s’enquit elle.
– Tout à fait mieux, approuva Bård avec satisfaction.
– Tes oreilles sont aussi légèrement pointues, lui fit remarquer Fen.
– Oui, mais si je garde mon bonnet, ça devrait aller.
– En effet, concéda-t-elle. Et bien, nous voilà d’apparence la plus humaine possible.
– On dirait bien, approuva l’adolescent. Il ne faut pas que les gens nous regardent de trop près, mais nous devrions pouvoir passer à peu près inaperçus.
– Veux tu reprendre notre voyage ou passer la fin de la journée ici ? lui proposa la vane.
– Je ne sais, hésita-t-il. D’un côté je n’ai pas envie de perdre du temps, mais d’un autre, je doute que nous trouvions un meilleur abri que celui ci pour la nuit. » De plus, même si il ne voulait pas l’avouer, il préférerait que Fen se repose dès à présent afin que la morsure que lui avait infligée le renard se guérisse plus rapidement. Si elle prenait du repos dès maintenant, peut être qu’elle serait presque totalement guérie le lendemain.
Elle posa soudainement sa main sur la tête du garçon et lui sourit de manière rassurante. « Restons ici ce soir, car ce sera probablement notre dernière soirée tranquille. Qui sait ce qui pourra nous arriver demain ? » Bård hocha la tête avec un sourire de soulagement. Même si il s’estimait trop grand pour ce genre d’effusions, il se pendit à son cou. Car, tout de même, c’était parfois bien agréable d’agir en petit garçon avec quelqu’un pour prendre soin de vous. Elle le serra tendrement dans ses bras et reprit : « Nous feras tu du feu ?
– Et si quelqu’un nous voyait ? s’inquiéta l’adolescent.
– Ne t’inquiètes pas pour ça, fait nous du feu dans ce petit recoin et moi, je vais m’occuper de dissimuler l’entrée. » Aussitôt dit, aussitôt fait. Tandis que le plus jeune rassemblait du bois, la vane rassemblait des pierres et des branchages pour camoufler l’entrée aux éventuels regards curieux. L’atmosphère sentant la neige à plein nez, elle ne s’inquiétait pas trop pour cela. Le blizzard qui s’annonçait les cacherait efficacement à la vue de quiconque serait assez fou pour le braver. Néanmoins, il en était d’autant plus essentiel de calfeutrer la petite grotte.
Lorsqu’elle rejoignit de nouveau son protégé, il avait assemblé un petit foyer et sorti son épée. « Que comptes tu faire avec ton arme ? s’enquit curieusement Fen. Tuer le bois ?
– Bien sûr que non, pouffa l’adolescent, il est déjà mort. » Il tira la langue. « Non, je veux voir si je peux réussir à allumer mon feu grâce à la rune du soleil.
– C’est cette rune là que tu as utilisée contre le meurtrier de ton père ? supposa la vane.
– Oui, tout à fait. » Confirma-t-il. Il plaça de nouveau l’encoche de son anneau devant la rune du soleil et tourna la tête de loup du pommeau.